Laura, 19 ans, est atteinte d’une infirmité motrice cérébrale. Après des années en établissement, elle aimerait vivre seule en autonomie (avec un peu d’aide). Un projet qui commence à prendre forme grâce à quatre semaines de stage de découverte et d'évaluation à domicile. Elle nous raconte son expérience pas à pas.

Faire ses courses en fauteuil roulant
Quand je fais mes courses, je montre, comme ici à Alexandra, ce que je souhaite acheter et qui n’est pas à ma portée. Les légumes, eux, le sont, je peux les choisir et les peser seule. À la caisse, c’est Alexandra qui m’aide à sortir ma monnaie.
L’objectif
Pendant le stage, j’apprends à établir une liste de courses en fonction de mes envies, à acheter des produits variés et si possible équilibrés. Jusqu’à présent, ce sont mes parents ou l’établissement qui m’aidaient à gérer mon alimentation. J’espère un jour faire ce choix-là aussi.

Se déplacer en fauteuil roulant en ville
Pour aller faire mes courses, j’ai besoin d’être accompagnée par Valérie, mais les trajets, je gère. J’ai appris très jeune, au sein du Centre d’éducation motrice (CEM) dans lequel je suis depuis l’âge de 11 ans, à prendre les transports en commun et à me déplacer et repérer en ville.
L’objectif
Plus tard, j’espère pouvoir sortir seule quand je le souhaite, notamment parce qu’ainsi je n’aurai pas besoin d’attendre qu’un gentil voisin rentre chez lui pour m’ouvrir la porte de l’immeuble !
Gérer son temps libre avec un handicap moteur
Je suis en vacances depuis deux semaines. En attendant la reprise de mes cours au Centre d’éducation motrice, j’en profite pour faire un peu plus de sorties dans le quartier.
L’objectif
Les semaines où j’ai cours sont plus denses. Là, je me retrouve seule plus souvent et je dois apprendre à gérer mon temps libre, à m’organiser, avec l’aide des éducateurs. Je suis parfois fatiguée parce que tout cela me demande beaucoup d’énergie.


Bénéficier de l’aide à l'autonomie des personnes handicapées
Marie-Alba est auxiliaire de vie. Elle intervient pour la toilette, les repas, l’entretien du logement.
L’objectif
J’ai besoin d’aide pour certains actes du quotidien, j’arrive à m’habiller ou à prendre un petit déjeuner, s’il est bien préparé. Au début du stage, on avait prévu avec le Service d’accompagnement à la vie sociale (SAVS) qui me suit durant tout le stage cinq heures par jour d’interventions d’auxiliaires de vie sociale (deux heures le matin et trois le soir) en semaine et six heures le week-end. En fait c’est trop. Je ne me rendais pas compte de mes besoins réels, moins importants que prévu et c’est tant mieux !

S’aider des applications handicap
L’appartement du stage est équipé d’un plan de travail à hauteur variable et de commandes pour ouvrir la porte d’entrée, les volets, allumer ou éteindre les lumières. Tout se commande à distance à l’aide d’une application handicap sur smartphone ou tablette. Marie-Laure, ergothérapeute, m’a aussi aidée à définir les adaptations nécessaires.


L’objectif
Je ne suis pas sûre de pouvoir trouver facilement un appartement adapté comme celui-là, mais vivre seule chez moi : c’est ce que je veux ! Le premier week-end ici, j’ai eu un petit coup de blues un soir, ma famille me manquait. Mes parents appréhendent de me voir partir de la maison, ils ont un peu peur, mais ils sont contents pour moi.

Définir les tâches autonomes
L’intervention des auxiliaires est indispensable pour que je puisse vivre chez moi. La relation est importante et, avec Marie-Alba, ça se passe très bien.
L’objectif
Je ne connaissais pas les auxiliaires de vie avant le stage et toute la difficulté réside dans le fait de bien exprimer ses besoins et de les anticiper, ce qui n’est pas si simple ! Je me brosse les dents seule, mais j’ai besoin d’un peu d’aide pour me rincer la bouche. Je mets mon linge dans la machine, que j’arrive à faire tourner seule, mais je dois penser à prévenir l’auxiliaire, de l’étendre. En établissement, on n’a pas à prévoir ou à anticiper autant ce que l’on veut faire et comment.

Bilan du stage de découverte et d'évaluation à domicile
Laura a expérimenté ce qu’était la vie à domicile dans l’appartement de stages de découverte et d’évaluation encadrés par le service d’accompagnement à la vie sociale de l’association régionale Rhône-Alpes des infirmes moteurs cérébraux (Arimc).
Les frais engendrés par le stage (loyer, charges, interventions de l’auxiliaire de vie) sont facturés à l’établissement d’origine de Laura. L’équipement domotique de l’appartement adapté a été financé par la Fondation Batigère.
S’il permet de tester les conditions de la vie en autonomie, ce stage reste très encadré et sécurisant, notamment grâce à un accompagnement quotidien et à la possibilité d’appeler un éducateur pour poser une question, exprimer ses difficultés, y compris la nuit et le week-end. En quatre semaines, Laura apprend à évaluer ses besoins, ce qu’elle peut faire seule et ce qu’elle doit déléguer. Deux bilans sont effectués au cours du stage par l’équipe pour faire le point et s’assurer que tout va bien. Et après le stage, Laura espère pouvoir tester une autre formule : l’appartement d’apprentissage. Cette fois, l’immersion est plus longue (parfois deux à trois ans). Dans d’autres cas, le stagiaire peut s’installer directement chez lui, retourner en établissement ou faire une autre demande d’orientation.


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Merci à :
Laura, Alexandra Guichard, éducatrice spécialisée, Valérie Papillon, conseillère en économie sociale et familiale, Gaëtan Louis, moniteur éducateur, Marie-Laure Perrinet, ergothérapeute, Nathalie Dubust, chef de service, Érick Brandt, directeur du Service d’accompagnement à la vie sociale (SAVS) de l’ARIMC, et Marie-Alba Dupuis, auxiliaire de vie au service d’aide à la personne « Âge et perspectives ».