Rencontre avec Nadine, maman de Carla Rapicano, 21 ans, porteuse de trisomie 21. Depuis qu’elle a six mois, la jeune fille baigne dans l’eau et la natation. Une passion et une persévérance qui l’ont conduite aux Jeux Mondiaux de Florence en juillet 2016, à l'époque où nous avions échangé avec sa maman.
« Lorsque j’étais enfant, j’ai appris à nager avec la désagréable sensation de devoir mettre la tête sous l’eau. Mes angoisses avec Carla étaient qu’elle n’aime pas le contact de l’eau, qu’elle ne sache pas nager, qu’il y ait un accident avec un risque de noyade. Alors, dès mon retour de maternité, pour commencer à l’habituer, je n’ai pas hésité à immerger ma fille dans son bain et à asperger son visage sous la douche ».
« La voir réussir ce qu’elle fait aujourd’hui, c’est un peu une revanche sur la vie et sur sa trisomie 21. À l’annonce du diagnostic de sa trisomie 21, la seule chose qu’on nous a dit, à mon époux Jean-Marie et moi-même, c’est que Carla serait affectueuse ! Aujourd’hui, même si Carla fait des erreurs lexicales et est un peu introvertie, elle sait s’exprimer et on la comprend. »
« C’est sa toute première activité. De 6 à 15 mois, elle a appris à découvrir les joies de la baignade, et quel bonheur de la voir au milieu des autres enfants ! Elle a été très vite à l’aise et elle adorait ».
« Quand Carla est née, j’avais 29 ans et un bon job. À 4 mois, sur les conseils de son orthophoniste, j’ai mis fin à mon activité professionnelle. En ayant fait le choix d’avoir un enfant, mon devoir était alors de me consacrer uniquement à l’éducation de ma fille pour tenter de lui offrir le meilleur avenir possible ».
« Avec du recul, je me dis qu’elle n’a pas eu d’enfance, même si je ne le regrette pas. Pas par rapport au fait que nous l’avons poussé à faire de la natation, ça non. Si elle n’avait pas aimé l’eau et qu’elle avait pleuré pour aller à la piscine, nous aurions tout de suite arrêté. Plutôt vis-à-vis du travail quotidien mis en place dès l’âge de 4 mois, entre les biberons et les siestes. Je me souviens des paroles de Nicole son orthophoniste, qui a suivi notre fille jusqu’à ses seize ans : « Il vaut mieux que Carla termine un exercice plutôt que trois qu’elle ne terminera pas. Carla n’a jamais été surprotégée et aujourd’hui, le travail fait partie d’elle. »
« Avant la naissance de Carla, mon mari et moi pratiquions une activité physique, sans plus. Alors, nous étions loin d’imaginer que notre fille accède à ce niveau. La compétition, c’est son choix. Nous sommes là pour la soutenir et l’accompagner. »
« Bien sûr, l’annonce du handicap, dès sa naissance, a été très difficile à vivre. Bien sûr, Carla est atteinte de trisomie 21 et ne pourra jamais vivre comme les autres adultes de son âge. Mais Carla a la chance de ne pas avoir de « sur handicap ». Elle se fatigue plus vite que les valides mais elle peut faire du sport en toute sécurité, sans contre-indications. Entre l’âge de 2 et 11 ans, elle était souvent malade, entre bronchiolites et angines, mais elle voulait quand même continuer à aller à la piscine. »
Carla Rapicano a pris ses premiers cours de natation à l’âge de 4 ans. « Même si elle n’avait pas les appuis au sol, à 7 ans, elle savait nager et nous pouvions l’inscrire en club pour qu’elle s’améliore. Nous l’avons alors définitivement licenciée à l’AMSLF Fréjus Natation, le club de sa ville, où elle s’y entraîne toujours en groupe 2 fois par semaine ».
« Pendant 10 ans, Carla a aussi pratiqué le modern-jazz, deux fois par semaine. Avec ce sport complémentaire à la natation, elle a entretenu souplesse et cardio ».
« Un jour, alors que Carla avait 18 ans, un maître-nageur qui la connaissait depuis qu’elle était toute petite m’a dit qu’elle nageait bien. Il m’a demandée s’il pouvait la tester. Je l’ai laissé faire. Il a évalué ses styles de nages, il l’a chronométrée et m’a dit qu’elle avait de très bons temps. Il m’a conseillée de l’inscrire en compétition, d’autant plus qu’elle comprenait très bien les consignes, malgré son handicap. »
« Une fois que la compétition est devenue une évidence, je me suis mis en quête d’un club pour accueillir Carla. Dix-huit ans après la naissance de ma fille, j’allais enfin découvrir le sport adapté qui s’adresse aux personnes porteuses de handicap mental ou troubles psychiques, à la différence de l’handisport qui concerne les personnes avec handicap physique. À Cannes, un club acceptait Carla, à raison d’une séance par semaine. Avec les embouteillages et la distance, c’était un peu compliqué. Alors la Présidente du club de Fréjus m’a présentée celui qui allait devenir le coach de Carla avec une facilité pour avoir accès aux structures, et une affiliation à la Fédération Française de Sport Adapté dans un club varois. Une année plus tard, Carla était championne régionale, et Fréjus créait une section sport adapté ».
Carla a débuté la compétition sur le tard, à l'âge de 18 ans
« Carla a son propre coach, Manuel, avec lequel elle s’entraîne 1h30 trois fois par semaine. Elle s’entraîne également en groupe, avec son club ordinaire, à raison d’une heure, deux fois par semaine. La compétition l’intéresse beaucoup, elle est très régulière et hyper sérieuse. Quand la piscine est fermée, elle a du mal à cacher sa déception. À la maison, elle fait des étirements et des abdos quotidiennement, et j’ai dû adapter son alimentation en fonction de ses dépenses énergétiques. »
« Elle comprend parfaitement ce qu’on lui demande et sait l’exécuter rapidement, d’où son classement en D1. Pour elle, tout est allé très vite puisqu’elle a commencé l’entraînement en septembre 2013 avec un titre quelques mois plus tard de championne régionale. En 2015, elle devenait double vice-championne de France Jeunes et championne de France chez les séniors. Cette année, elle est revenue des championnats de France disputés à Vichy avec deux titres de championne de France sur 400 m nage libre et 200 mètres 4 nages. »
« Depuis que Carla fait de la compétition, j’ai réalisé une plaquette présentant le projet sportif de Carla pour obtenir des soutiens financiers et j’ai créé sa page Facebook. Beaucoup de temps passé dans les dossiers, les échanges téléphoniques, sur le web et sur le terrain, mais Carla le mérite vraiment ».
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