Pour les enfants en situation de handicap, et notamment autistes, le rendez-vous chez le dentiste est un moment (affreusement) difficile. Il est pourtant possible de préparer les consultations au sein d’un réseau de soins ou en cabinet ordinaire.
Après quelques minutes d’attente devant le cabinet du dentiste, Noam, 9 ans, s’apprête à s’asseoir sur le fauteuil tant redouté lors de sa première séance. Le petit garçon est atteint de troubles du spectre autistique (TSA) et n’est pas vraiment bien chez le dentiste. Il participait à l'époque où nous avions rédigé l'article à des séances d’éducation thérapeutique dentaire proposées par l’association Santé orale, handicap, dépendance et vulnérabilité (Sohdev) au service d’odontologie du centre hospitalier Le Vinatier à Bron. Un cabinet de dentiste plus vrai que nature avait été reconstitué avec un fauteuil, la fameuse lampe qui fait mal aux yeux, les outils et Jean-Marc Amichia, chirurgien-dentiste et chargé d’éducation thérapeutique avec sa blouse bleue. Au fil des séances, Noam apprenait comment bien se laver les dents, il se familiarisait aussi avec l’environnement. Un moyen de favoriser son autonomie, d’améliorer sa santé bucco-dentaire et de réduire les appréhensions avant un rendez-vous chez le dentiste.
La priorité des équipes de l’association Sohdev reste la prévention bucco-dentaire. «Intervenir en amont, en apprenant à l’enfant et à sa famille comment bien prendre soin de sa bouche permet d’éviter l’urgence et les soins dentaires douloureux, explique Éric-Nicolas Bory, chef du service d’odontologie de l’hôpital et président de l’association Sohdev. Lors de ces séances, la coopération avec les parents est essentielle car ce sont eux qui vont bien souvent traduire ce que l’enfant n’arrive pas à exprimer.» Noam utilise des pictogrammes, les dentistes du service s’en servent pour expliquer les étapes du brossage, mais aussi ce qui va se passer lors de la séance. Tous les pictogrammes du Programme autisme et santé orale (Paso) ont été créés à partir du programme éducatif TEACCH (Treatment and Education of Autistic and Related Communications Handicapped Children) qui s’appuie sur la structuration de l’espace, du temps et de la communication.
« À quoi sert la bouche ? À manger, parler, respirer. Il faut en prendre bien soin, notamment en se brossant les dents chaque jour de la bonne façon. Comment on fait ? Je vais te montrer! » En plus des techniques de brossage des dents enseignées à Noam, Jean-Marc Amichia conseille à sa maman un bain de bouche contenant du fluor pour améliorer l’hygiène buccale et limiter l’apparition des caries. Il lui suggère aussi l’utilisation d’une brosse à dents souple qui respecte mieux la gencive et se glisse plus facilement entre les dents. Le brossage, c’est tous les jours à la même heure, et si l’enfant a du mal à respecter les étapes, une séquence en images affichée au mur dans la salle de bain peut l’aider à se repérer.
Lors de la première séance, l’équipe évalue le degré d’hygiène dentaire de l’enfant handicapé et établit ensuite un projet éducatif individualisé. Selon les besoins, les difficultés rencontrées, cinq à six séances seront nécessaires avant de passer aux soins réels au sein du service d’odontologie de l’hôpital. Noam approche de la fin du programme. Il est aujourd’hui capable de rester assis, d’écouter ce que dit le dentiste, d’accepter un outil de soin dans sa bouche. Pour en arriver là, le professionnel a procédé par étapes, tout doucement. En plaçant par exemple chaque outil sur la main de Noam ou près de son visage en lui décrivant les sensations: « Tu vois, ça roule, il y a un peu de bruit, mais cela ne fait pas mal » Noam sourit, reconnaît les outils et ne montre aucun signe d’angoisse. Quand les enfants ont trop peur, le dentiste invite les parents à s’asseoir dans le fauteuil et à les prendre sur leurs genoux. Le Time timer utilisé pour montrer la durée de la séance va bientôt s’arrêter. Ces rendez-vous font désormais partie de la routine du garçon.
« L’autre objectif de ces séances d’éducation thérapeutique, poursuit Éric-Nicolas Bory, est de faire en sorte que l’enfant soit capable de se rendre un jour dans n’importe quel cabinet pour un rendez-vous chez le dentiste. Le praticien doit expliquer à l’enfant ce qui va se passer, surtout chez des patients porteurs d’autisme. Les cris et les pleurs, des mouvements incontrôlés peuvent déstabiliser un dentiste n’ayant pas l’habitude des enfants en situation de handicap. Mais en dehors des soins spécifiques ou d’une intervention importante, un suivi classique chez un professionnel bienveillant et sensibilisé suffit. »
Pour trouver un professionnel formé à la prise en charge du handicap près de chez vous, pensez aux principaux réseaux de soins en France listé sur le site de l'Ordre national des chirurgines dentistes
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